Comment redynamiser le tourisme en France ?

Sandrine Legrand / Professeur de sciences économiques et sociale

Les Echos
Le secteur touristique français perd des parts de marché face à ses concurrents internationaux. L’Etat multiplie les initiatives pour lui donner un coup de pouce.

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mercredi 8 avril 2015, par administrateur

Les Echos

84,7 millions. C’est le nombre de touristes qui se sont rendus en France en 2014, faisant de l’Hexagone la première destination touristique mondiale. Plus important, ces touristes ont dépensé plus de 54 milliards d’euros et généré plus d’un million d’emplois directs. Toutefois, le nombre de touristes venant en France stagne depuis quelques années et l’on voit se rapprocher dangereusement l’Espagne, qui grappille tous les ans des parts de marché.

Là où le bât blesse véritablement, c’est que le pays ibérique, tout comme les États-Unis, dépasse la France en termes de recettes touristiques. Concrètement, même si les touristes viennent en France, ils ne consomment pas.
Mobilisation générale

C’est la raison pour laquelle François Hollande a décrété, lors de la clôture des Assises du tourisme, à l’été 2013, une mobilisation générale pour redynamiser le tourisme français, l’érigeant même « en cause nationale ». L’ambition du Président de la République est d’accueillir 100 millions de touristes étrangers d’ici à 2030, dans un marché mondial qui devrait atteindre les 2 milliards.

Pour réussir ce pari, la France s’est dotée d’une agence de développement touristique, Atout France, pour promouvoir le tourisme dans son ensemble et favoriser le développement du secteur. Surtout, cet organisme, unique en son genre, doit permettre d’éclairer sur les difficultés du secteur.

Maîtriser l’e-tourisme

Le rapport parlementaire a pointé plusieurs transformations qui affectent le secteur touristique. Le premier d’entre eux est la désintermédiation numérique, c’est-à-dire l’utilisation des outils numériques. Dorénavant il n’existe plus un tourisme, mais des tourismes avec l’e-tourisme sur le web, le m-tourisme sur les mobiles et le tourisme social sur les réseaux sociaux. Aujourd’hui, plus de 80 % des touristes préparent leurs voyages sur internet. Que ce soit dans la préparation ou dans la réservation, la maîtrise du numérique est devenu indispensable, chose que les professionnels du tourisme français ont mis du temps à comprendre et à appliquer.

L’échec d’Hexatourisme illustre ces problématiques . Censé être le Google du tourisme français, étant un moteur de recherche de l’information touristique, marchande ou non, le projet est mort-né en raison du peu de participation, seules quatre régions, et un manque de financement. Malgré cet échec, l’idée d’un portail unique ne semble toutefois pas abandonnée.

Également, la classification des hébergements, voulue par la France pour s’aligner sur les standards internationaux, modifie le marché. Ainsi on assiste à une baisse de la fréquentation des établissements d’hébergement (hôtel, camping,) non classés de-14,4 % en 2014. Au contraire, les hôtels étoilés bénéficient d’une augmentation de clientèle, les clients osant moins aller dans les établissements non classés, ce qui amène à une baisse générale de la fréquentation touristique de -1,2 % sur l’année 2014.

Miser sur le tourisme de mémoire

Évidemment le tourisme français n’est pas mort et de multiples solutions existent, notamment la diversification des activités qui semble être indispensable. Plusieurs types de tourisme semblent être particulièrement bien adaptés à la France. On pense au tourisme de mémoire, qui a attiré 12 millions de touristes en France en 2014, soit une augmentation de 42 % par rapport à 2013.

Le gouvernement ne s’y est d’ailleurs pas trompé puisqu’il a lancé le 20 mars un Observatoire du tourisme de mémoire pour mieux connaitre ce secteur et mesurer ces apports. Mais d’autres niches pourraient être étudiées comme le tourisme médical qui, selon l’économiste Jean de Kervasdoué ; apporterait 2 milliards d’euros et la création de 30.000 emplois dans les cinq ans grâce au développement de l’accueil des patients étrangers en France.

L’industrie du tourisme en France n’est donc pas en déclin, même si elle traverse quelques difficultés. Cette prise de conscience a même dépassé la sphère à proprement parlé touristique comme le montre le lancement de l’opération « Goût de France/Good France » par le Quai d’Orsay pour faire de la gastronomie, un vecteur d’attractivité de la France.


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